Touche pas à mon Maroc

Publié le : 20.04.2007 | 15h57

Les citoyens condamnent le terrorisme et ses commanditaires

Les Marocains ont exprimé, jeudi soir à Casablanca, leur union contre la terreur ainsi que leur rejet de la violence obscurantiste et de la barbarie.

Lors d'un sit-in à la Place Mohammed V, auquel ont participé plusieurs centaines de manifestants, il était question de faire front commun contre terrorisme et d'envoyer un message clair aux promoteurs de la mort : «Les Marocains ne fléchiront pas face à la terreur et resteront, à jamais, attachés à leurs valeurs, à la vie».

Femmes et hommes, jeunes, moins jeunes et enfants, quelques visages connus, d'autres méconnus, musulmans ou juifs, la société marocaine, dans toute sa diversité, était représentée lors de ce rassemblement où était, également, représentées les différentes sensibilités associatives, culturelles, artistiques, politiques et syndicales.

Les rassemblements étant déconseillés en pareille circonstance, et en dépit du risque que cela pouvait, éventuellement, représenter, les Marocains ont bravé la menace terroriste pour descendre dans la rue et crier leur colère. Et c'est, justement, le comportement qui doit prévaloir, en lieu et place de celui du repli sur soi et du confinement auquel aspirent les semeurs de la haine.

«Je ne suis pas terrorisé, l'objectif des obscurantistes n'a pas été atteint, la psychose ne s'est pas installée, pour preuve, je suis là, dans cette immense foule avec ma petite famille pour dire aux terroristes qu'ils se sont trompé de pays, que nous sommes un peuple qui aspire à la vie et à l'amour de l'autre, et que leur idéologie barbare n'obtiendra jamais gain de cause», déclare Adil, la quarantaine, accompagné de son épouse, sa fillette de 4 ans sur ses épaules et son fils de 6 ans tenu par la main.

Impliqués sans en saisir le sens dans le sit-in, les deux chérubins
portent chacun un bandana blanc autour de la tête, sur lequel est écrit, en rouge : «Non au terrorisme».

Un handicapé, sur son fauteuil roulant, portant le même bandana, se fraie un chemin dans la foule, pour se retrouver au centre de la manif, levant le bras droit et scandant des slogans hostiles aux promoteurs de la mort.

Des femmes, en djellaba et foulard, des jeunes filles, en jeans et chemisette, d'autres portant le voile, des hommes en costume et cravate, d'autres en tenue sport, des jeunes accoutrés à la manière des rappeurs, jeans et t-shirt extra-large, d'autres adeptes du style rasta, la tignasse en dreadlocks : toutes les tendances avaient fusionné pour ne former qu'une seule et unique entité, solidaire autour des mêmes valeurs.

Dans la foule, des banderoles sont brandies par les manifestants, exprimant le rejet de l'idéologie obscurantiste et de la violence quelle que soit sa nature. Le fameux «Touche pas à mon pays» refait surface.
Vêtue de blanc et tenant un grand portrait de son mari entre les mains, Najia, l'épouse de Mohamed Zindiba, l'inspecteur de police tué à Hay Al-Farah, prend part à la manifestation.

«Non à la haine, tous contre l'obscurantisme», «Terroristes dehors, le Maroc est ma terre, ma liberté», «Tous contre les assassins, les extrémistes, les obscurantistes, les sauvages, les lâches, les traîtres» : les slogans scandés contre les ennemis de la vie étaient d'une rare virulence.

Durant près d'une heure, les manifestants poursuivront leur mouvement de protestation, avec la même vigueur. Vers la fin du sit-in, avant que la foule ne se disperse, dans un coin de la place, une vingtaine de jeunes, filles et garçons, se mettent en cercle et chantent, en chœur, haut et fort, l'hymne national. Une fin en beauté, en guise de message final aux obscurantistes et à leurs disciples illuminés et qui se passe de tout commentaire.

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Nous ne cèderons pas à la psychose !
Un important dispositif de sécurité a été déployé aux alentours de la Place Mohammed V, à l'occasion du sit-in contre le terrorisme. Divers corps des forces de l'ordre avaient pris place bien avant le début de la manifestation.

La tension était palpable. Et il y avait de quoi, la menace terroriste pèse de tout son poids sur les esprits. Le souvenir cauchemardesque du kamikaze, qui sort de nulle part et qui s'est fait exploser au milieu des forces de l'ordre, est toujours présent.

Les forces de l'ordre guettaient le moindre comportement
douteux. Durant ce sit-in, tout visage suspect suscitait une attention particulière : un barbu en tenue afghane s'approchant de la foule, tenant un énorme sac en plastique à la main, avait de quoi éveiller une certaine alerte.

Tout comme un jeune portant un gros sac à dos et s'engouffrant dans la manifestation. Chose qui n'a pas empêché les Marocains de poursuivre leur rassemblement et d'exprimer leur rejet de la terreur, durant près d'une heure.

Cependant, toutes ces personnes à l'apparence louche et au comportement « suspect » ne sont, ni plus ni moins, que des aspects de la vie de tous les jours. Des Marocains barbus «déguisés» en Afghans, des jeunes avec des sacs banane ou des sacs à dos, on en croise tous les jours, à chaque fois qu'on marche dans la rue ou lorsqu'on fait ses courses.

Et c'est là la leçon à retenir de ce rassemblement : ne pas céder à la psychose.
La vie a toujours été ce qu'elle a été. Les comportements les plus suspects que l'on pourrait constater, en pareille période, ont toujours existé, sans qu'on n'y prête la moindre attention.


Abdelhakim Hamdane | LE MATIN